April 25, 2024

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Réponse au sujet de l’Islam et la culture d’honneur et honte

http://www.theaugeanstables.com/2017/04/25/reponse-au-sujet-de-lislam-et-la-culture-dhonneur-et-honte/

J’ai recu une requête par facebook d’un chercheur francais au sujet de mon article sur Edward Said et la culture d’honneur et de honte. Il m’a adressé la question en anglais, j’ai répondu en français pour essayer de formuler mes idées dans une autre langue.

(i) would you have any idea why honor and shame-avoidance seem to be such strong motivations in the muslim world compared to most non-muslim countries?

La puissance du désir pour l’honneur et crainte (dread) de la honte (oneidophobie) est énorme. Tout individu y est lié toute sa vie, et tout culture passe par ce “primary honor code.” Cela prend une forme particulièrement tenace chez les tribes de guerriers, comme les germains, celtes, romains, grecs, sioux, japonais, mongols, africains, bedouins, berbers, etc. Cette dynamique guerrier se trouve partout dans le monde, et certainement l’importance de la dynamique honneur-honte est universelle.

Par contre, dans l’occident on a su (à travers le dernier millénaire) transférer pas mal de valeurs à un “secondary honor code” qui renversent le sens moral de certaines pratiques culturelles clées – e.g., le duel, l’esclavage (v. Appiah, The Honor Code and Moral Revolutions). Ce processus a produit entre autres, les démocraties, et la culture de connaissance/technologie/production qui en ce moment est l’hegemon du monde (siècle de globalisation), et peut-être destructeur de ce meme monde d’abondance.
Pourquoi les musulmans, en particulier les arabes, ont eu plus de problèmes avec ce processus? Tous le monde (y compris l’Occident) expérimente le processus d’arriver à une société civile et pacifique comme traume (pour l’occident, voir l’oeuvre de Norman Cohn). Par contre, les autres cultures non-occidentales même en gardant la dynamique honneur-honte en premier place, néanmoins arrivent à s’adapter au monde moderne, semble mieux négocier cette transformation. (eg Japon premier, aujourd’hui pas mal des cultures confucéennes)
Certainement le problème de l’Islam qui, dans sa forme politique (dar al Islam/dar al Harb) traduit les préoccupations d’honneur et honte en religiosité triomphaliste. “Nous avons la vrai foi, car nous dominons” (somme-nul). Donc la victoire d’un occident post-honneur (qu’ils voient comme une forme d’emasculation), constitue une insulte narcissique intolérable, surtout après l’humiliation globale que represents Israel. Le destin interrompue. Ils sont donc dans un spirale négatif ou ils cherchent a détruire le succès de l’autre par une autodestruction (somme-negative, terror-suicidaire)
(ii) according to you, why has the quest for honor taken a more and more religious overtone since the 1970s in the muslim world, i.e. from Morocco to Indonesia?

D’abord pour les musulmans du proche orient (les arabes), le “nationalisme arabe” (oxymoron du premier ordre) avait tendu la promesse messianique: en devenant séculier on pourrait maitriser le monde moderne, et developper la puissance de a) détruire Israel (laver notre visage noirci dans leur sang), et b) ainsi tenir tête (au moins) au occidentaux.

Après le naqbah de 1948, toute l’énergie des élites était dirigée dans cette direction, avec des résultats médiocres. Les pertes catastrophiques de 1967 et 1973 contre le minuscule Israel, ont détruit la force de cette promesse de liberation “national et séculier.” Donc, le souterrain jihadist (toujours présent même si pas dans la conscience des occidentaux qui insistent toujours à voir les palestiniens en termes laïcs comme mouvement “national”), resurgi: ça a toujours était un jihad. Le nouveau message salafiste:
On a pas fait faillite devant le monde parce qu’on était insuffisamment séculier (une concession humiliante à l’ennemi), mais parce qu’on était insuffisamment dévoué.
Dans les deux cas, la motivation est de redresser la perte d’honneur, de se venger, de verser le sang et retrouver son statut d’homme d’honneur, de respecte. L’aspect religieux, malgré le fait qu’elle va à l’encontre des movements globales sécularisants, prend élan avec l’arrivée du mujaddid en 1979 (voir plus bas).
Dans le reste du monde musulman (le mondes des peuples convertis, selon Naipaul), je croie qu’une dynamique allié, mais beaucoup plus multidirectionnelle, s’est déclenchée surtout en 1400 AH (1979). C’est le 14e mujaddid, moment centenaire qui au moins depuis 200 AH (815 CE), promet aux croyant l’apparition d’un “restaurateur” (dans l’analyse apocalyptique: un rédempteur/mahdi avant l’avent du centenaire, restaurateur après, ex post defectu).
Ce fut certainement un élément clé dans la transformation de la théologie shi’ite de Khoumeini (eg à Paris) en movement révolutionnaire (ie millénariste) en 1400/1979, un développement qui eu rapidement eu une réponse dans le monde Sunni, surtout avec l’émergence d’al Qaeda et Hamas (1408/1988).
Bref, le Mujaddid de 1400 déclencha (à mon estimation) la vague de millénarisme apocalyptique qui eu un point fort au tournant de notre centenaire/millenaire en 2000, et qui continue à croitre. Yussuf al Qaradawi considère tout le 15e siècle, déclenché par le mujjadid, comme le temps pendant lequel Dar al Islam globale va s’étendre, non seulement par le Jihad, mais aussi, même plus important, par Da’wa. Le premiers remuements de cet esprit apocalyptique/millénariste se voient parmis les musulmans non-arabes déjà dans le récit de voyage de VS Naipaul publié en 1981, bienque pour lui, comme pour Gilles Kepel in 2000, c’était le crépuscule de ces rebondis zélotes. Le Pakistan nous fourni un bon exemple d’un militantisme islamiste lié à une culture d’honneur et honte tres prononcés. (idem Afghanistan et tout les autres sociétés tribales musulmans (Somalie, Nigere, Sudan).
Ceci dit, on espère que dans les courants spirituels musulmans, on trouve un millénarisme un peu moins triomphaliste, p-e meme, démotique. Mais a présent, dans le monde musulman, les gens qui prone la dynamique honneur-honte (primary code), les oneidophobes, domine l’espace public (ie c’est eux qui définissent le groupe d’honneur: s’occidentaliser c’est s’émasculer). Ils ont un point de vue radicalement somme-nul (facilement somme négative – les nouveau “martyrs” du 15e siècle), ils n’hésitent pas à recourir à la violence pour imposer leur hégémonie (takfir), et donc la revitalisation de la l’Islam de nos jours est, pour la plupart, très belligerent non seulement contre les kufars (nous), mais aussi contre les musulmans insuffisamment mobilisés.
Je n’ai pas de solutions. Je crois qu’on ne peut s’adresser à ces choses, qu’en commençant par la compréhension du problème, et ensuite (ou pendant le processus de compréhension), on trouve des solutions, ou au moins de chemins a suivre. De se défendre la compréhension parce que les problèmes ainsi identifiés n’ont pas de solutions immédiatements identifiables, ou parce que c’est un “racisme orientaliste” d’ainsi parler des sociétés musulmanes, ne me semble pas un processus de raisonnement mais plutôt de dhimmitude proleptique.

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